L'homosexualité est-elle un choix?…
A l’heure où les orientations homosexuelles ne sont plus stigmatisées par la loi puisque l’un des derniers (?) bastions a cédé via la possibilité du mariage entre personnes de même sexe, une question se pose encore et fait l’objet de vifs débats où plusieurs idéologies se confrontent, et s’affrontent parfois…
L’homosexualité est-elle un choix, et quels sont les facteurs génétiques, éducatifs, psycho-affectifs qui ont bien pu déterminer cette orientation, non conforme à la norme dominante, procréative, conjugale et hétérosexuelle…
Coincées entre la vision naturaliste et normative qui met en avant la fonction procréatrice de la sexualité, et les relents d’une psychanalyse début 20eme semant le doute sur la maturité affective et l’incapacité à couper le lien avec le père ou la mère, les homosexualités sont encore considérées bien souvent comme dérangeantes, marginales, voire anormales, et suscitent nombre de comportements ironiques, dépréciatifs et discriminants.
Qu’en sera-t-il donc de la norme du 21ème siècle? Restera -telle hétéro-centrée selon le modèle traditionnel du couple procréatif?… Et l’orientation affective et amoureuse, et l’orientation sexuelle dans tout ça? Seront-elles soumises et conditionnées par des déterminants tels que l’éducation, la génétique, le conditionnement sociétal, les premières empreintes d’attachement, la relation au père ou à la mère, qui, si trop fusionnelle, perturberait l’accès à une sexualité dite « adulte »?…
Philippe Brenot, psychiatre, anthropologue et auteur de « Homo ou Hétéro, est-ce un choix? », nous propose de sortir des sentiers doctrinaux et de dépassionner le débat très vif qui depuis plusieurs années fait s’affronter plusieurs idéologies…
En étant avant tout dans la nuance, le court et néanmoins très documenté ouvrage de Philippe Brenot*, pose ici la question des origines des orientations sexuelles. Origines, qui, de par leur complexité et la multiplicité des critères et échelles d’explications s’y afférant, ne peuvent se satisfaire d’une explication les cantonnant dans le seul champ de l’attirance physique et érotique; en effet, les notions d’attachement et de liens affectifs viennent encore enrichir la palette des déterminants… et permettent néanmoins de ne pas se borner à des analyses émanant du « tout constructiviste », « tout médical » « tout psy », ou « tout sexuel »!
Ainsi, explique-t-il, bien que les recherches scientifiques et cliniques aient abouti en 1980 à déclasser l’homosexualité en tant que trouble mental (DSM-III), et que, depuis 1983, l’orientation homosexuelle ne figure plus dans la classification des comportements psychologiques pathologiques (Classification Internationale de l’OMS), les pratiques et orientations homosexuelles ne sont pas considérées comme « normales », car reposant sur l’idée que la fécondité est indissociable de la sexualité.
Pour mieux comprendre comment notre inconscient collectif a été imprégné par de multiples héritages culturels, politiques, religieux et idéologiques, l’anthropologue qu’est Philippe Brenot nous fait voyager du néolithique à nos jours… Il interroge une dépénalisation qui « ne supprime en rien l’homophobie bien que cette dernière tombe sous le coup de la loi »!
Et chacun peut revenir à cette réalité des témoignages de personnes d’orientation homosexuelle, qui parlent de ce sentiment « d’étrangeté » qui les oblige à biaiser, à ne pas dévoiler leur situation de couple sous peine de conséquences professionnelles, sociales ou familiales dommageables..
Pourtant, et ce sera la note de fraicheur et d’optimisme finale, dans le film de Jérôme Bonnell « A trois, on y va », c’est l’attirance amoureuse et la force des sentiments qu’éprouve Mélodie (Anaïs Demoustier toujours naturelle et d’une sensualité à fleur de peau) pour Charlotte et Micha qui sont mises ici en avant. Et alors on ne se pose pas la question de « homo, hétéro ou bi? » en les suivant dans leurs rapprochements intimes. Aucune approche caricaturale ici, ni leçon de morale, avec juste la question de l’amour possible à deux, trois, et jusqu’où, jusqu’à quand?…
*Philippe Brenot a également été le conseiller scientifique du documentaire « Homo ou hétéro, est-ce un choix? » diffusé par France2 le mardi 23 mars dernier dans l’émission Infrarouge… La fin de son ouvrage vient approfondir et compléter la réponse à cette question…
Philippe Brenot, « Homo ou Hétéro, est-ce un choix? », 2015, L’Esprit du Temps